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Au long du Gier

Entre St Etienne et Lyon, la vallée du Gier est un témoignage du développement industriel et de son déclin.

Ce reportage a fait l’objet d’une installation à St Chamond avec une projection et un accrochage des photos. Pour voir l’installation et la vidéo : www.xpages-photographe/aulongdugier

La vallée du Gier, par sa situation géographique et ses ressources naturelles a connu une histoire industrielle dès la fin du XVIIème siècle, avec une activité s’intensifiant de la seconde moitié du XIXéme aux crises économiques successives de la fin du XXème siècle. Sa position, entre Rhône et Loire, fait de la vallée un axe de communication important. Elle a bénéficié de la création de la deuxième ligne de chemin de fer de France (1830-1832) reliant St Etienne à Lyon. La présence dans le sous-sol d’un important gise­ment de houille et donc de ressources énergétiques primordiales, associées à l’invention de la machine à vapeur, a permis le développement d’une industrie lourde (sidérurgie, métallurgie…). Mais c’est avant tout la présence d’un cours d’eau qui est le point de départ de l’installation des manufactures, et des industries. Le Gier a tout d’abord été exploité comme force motrice permettant d’entraîner, entre autres, des métiers à tisser. Par la suite, la qualité et le débit de cette eau de montagne ont permis l’essor de la production du verre et du métal.
Depuis le milieu des années 80, la vallée fait face à la désindustrialisation. Nombre des grandes entreprises qui faisaient vivre la vallée sont parties, laissant place à un doute sur son avenir. La vallée vivait dans une intimité étroite avec ses entreprises : elles étaient le pivot de la gestion politique et de la vie sociale. L’érosion spectaculaire de l’emploi a entraîné une délitescence de l’identité ouvrière et l’abandon de nombreux sites industriels.

En dehors de St Chamond et de Givors, l’urbanisation de la vallée est récente. L’industrialisation a entraîné une migration massive de la population rurale environnante, et une immigration dès l’entre-deux guerres : la vallée s’est urbanisée. La rivière coulant au fond d’une vallée boisée et légèrement encaissée a laissé place à une succession d’usines et de cheminées. Cette conquête du territoire a complètement modifié le paysage. L’industrie a créé un panorama à son image. Le Gier est devenu un élément de cette activité industrielle, et à ce titre, a été aussi transformé. Exploité pour son énergie hydraulique et son eau de qualité, il a fallu le dompter, le canaliser pour faire face aux crues, le détourner pour alimenter des usines ou laisser place à des constructions, le barrer pour régler son débit et créer des retenues pour la consommation. En parallèle, on l’a nourri de toutes les déjections : rejets d’usines de tous types, égouts d’habitations… Enfin, il a été recouvert par endroits, comme pour l’oublier.
Le Gier a une réalité commune avec d’autres vallées en France et dans le monde, historiquement ou de façon contemtporaine : exode rural et attractions des populations ; constructions d’écoles, d’hôpitaux ; exploitation jusqu’à l’usure des ressources énergétiques présentes ; pollution des eaux et des sols ; luttes pour les droits des salariés et lutte des classes ; délocalisation des sites de production ; restructurations, rachats, fermetures d’usines, pertes d’emplois, requalification et destruction des sites, transformation en zones d’habitations ou commerciales ; départ d’une partie de la population…
Le Gier n’existe plus, les usines sont vides et le travailleur est épuisé. L’histoire du Gier ressemble étrangement au destin des ouvriers de la vallée, exploités, usés et oubliés.

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